Raconter la guerre, une histoire des correspondants de guerre

Un beau livre sur un métier méconnu, dangereux et pourtant incontournable pour montrer un autre visage de la guerre
De
Adrien Jaulmes
Editions des Équateurs
Octobre
21,25 €
Notre recommandation
4/5

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Lu / Vu par

Thème

 Derrière un titre à la fois ambitieux et modeste, “Raconter la guerre”, Adrien Jaulmes nous propose une anthologie riche en textes, en témoignages et en illustrations. Né d’une exposition, ce livre intelligent raconte l’émergence et la puissance saisissante du reportage de guerre qui suit de moins en moins les chefs et de plus en plus les soldats et les populations pour saisir, témoigner et faire comprendre des pans d’histoire auxquels les correspondants de guerre, aux visages encore moins connus que les noms, ne survivent pas tous. A l’exemple de leur maître, Albert Londres, il s’agit d’aller sur place, de raconter et de transmettre les moments cruels de l’humanité en action.

Points forts

Les correspondants de guerre sont presque nés avec elle mais, après les historiens antiques et littérateurs modernes qui tissèrent du point de vue officiel les épopées de leurs siècles, c’est la modernité et ses moyens de communications qui en font, depuis près de 180 ans, les témoins directs des guerres.

Le livre raconte avec talent et pédagogie cet art de « brouillon de l’Histoire », les contraintes des conflits, à la fois communs et différents, le besoin d’être là au plus tôt et au plus près pour voir, écrire ou dire, et diffuser quelles que soient les conditions ce que bon nombre d’acteurs n’ont pas envie d’entendre.

A la fois héros anonyme et suspect pour la censure, gêneur poussé à l’écart voire parfois tenu comme responsable de défaites comme au Vietnam, le reporter suit au plus près l’évolution technique qui progressivement double le son de l’image, réduit le temps à l’immédiat, élargit l’horizon à l’universel, frappe et choque l’opinion, crée l’émotion et même s’engage pour les causes qu’il va graver dans l’actualité pour la défendre.

Derrière ce métier à part où les couleurs locales sont meurtries de noir et blanc, il y a surtout des caractères de la même trempe humaine que leurs sujets. Cette confrérie sans frontières compte plus d’anonymes et de disparus que de célébrités même si certaines légendes de la politique et de la littérature (Churchill, Hemingway, Saint Exupéry, Martha Gellhorn), de la photographie et du cinéma ont fait leurs armes dans ses rangs.

Quelques réserves

Je n’en vois pas à souligner.

Encore un mot...

Trait d’union entre l’avant et l’arrière, témoins engagés en 1er échelon, le métier de correspondant de guerre s’adapte à de nouveaux contextes : une féminisation croissante, une posture d’otage pris entre des feux et des exigences contradictoires, une cohabitation complexe entre l’immédiateté et le recul du temps long, le droit d’informer et le devoir de confidentialité, de l’authenticité des sources et de la sécurité, la compétition féroce pour la primeur et le scoop qui feront vendre, la récupération partisane et le passage au JT de 20 heures…

En parcourant l’histoire des correspondants de guerre, c’est à un panorama synthétique et complet de l’art de raconter la guerre que l’auteur nous convie.

Une phrase

 « Abandonné à la mort… Mon crayon est lourd ! (Samuel Wilkeson, apprenant la mort de son fils sur le front qu’il couvre) ».

« Je suis désolé, mon colonel, mais j’ai pris cette ville moi-même avant le petit déjeuner (Stephen Crane) ».

Un très bon coup d’œil et le sens des évènements.

Dans leur recherche de la bonne histoire, ils n’hésitent pas toujours à mélanger la fiction et la réalité.

Il roule vers le front « à la recherche de la guerre ».

« Les images sont là, il n’y a qu’à les prendre. C’est la vérité qui fait les meilleures photos, la meilleure propagande (Robert Capa) ».

« Si je le pouvais, je retirerais ce jour-là de ma vie et j’en détruirais le souvenir (J-F. Chauvel, à propos du Biafra) ».

L'auteur

Adrien Jaulmes, grand reporter au Figaro, a été officier en service au 2e régiment étranger de parachutistes. Lauréat du Prix Albert Londres en 2002 et du Prix Bayeux-Calvados-Normandie des correspondants de guerre en 2007, il est l’auteur de récits : Amérak (2009) et Sur les traces de George Orwell (2019) déjà publiés aux éditions des Équateurs.

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