Cœur bleu, voyage en Bretagne
45 photographies
96 pages
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Thème
Cœur bleu, voyage en Bretagne est un essai photographique autour d’un journal, un éphéméride, retraçant un itinéraire de souvenirs et constitué d’un recueil d’émotions accumulées lors d’une succession de brefs séjours dans une propriété de famille ancestrale, les Flégés. C’est un petit château, du tout début 18e siècle, dans son jus et caché dans les méandres de la Minette, petite rivière charmante qui se jette un peu plus loin dans le Couesnon bien connu : « dans sa folie, il mit le mont en Normandie ». Amaury da Cunha, a passé, jeune homme, quelques vacances dans cette propriété de son arrière-grand-mère.
Il raconte simplement avec une émotion non feinte des souvenirs de famille et des découvertes rares, des trésors remontant certains à des temps immémoriaux, d’autres à la Révolution. Car l’auteur possède un double talent de conteur avec ses mots, sa phraséologie de poète et avec ses propres images de photographe d’art. Les unes répondent aux autres. Chacune de ses photos racontent une histoire, chaque couleur renvoie à son double. Le vert est plus vert que vert, les nuances de bleu (sa couleur fétiche) sont gorgées de noir. Après la couverture illustrée d’un chevreuil, nimbé de bleu, aux bois naissants, voici une première photo souvenir : deux petites filles jouant et courant dans un jardin au cœur d’un crépuscule très sombre.
Les robes blanches réfléchissent la lumière de la lune. Magnifique. Mais, comme l’écrit Amaury da Cunha, les photographies qui échappent au langage sont les plus désarmantes et les plus émouvantes. Justement, plus loin, surgit le profil d’un homme octogénaire qui porte encore beau et distingué ; juste après, un chien de chasse nage dans un étang tapissé en surface par des milliers de lentilles d’eau. Il faut beaucoup de délicatesse, de sensibilité pour exprimer ainsi son attachement à la Bretagne, cette Bretagne-là, la Bretagne des bois et des marais, l’Argoat par opposition à l’Armor plus souriante, la Bretagne des terres versus celle de la mer. Les terres « chouannes » entre Fougères et Combourg, un pays cher à Balzac et à Jean Guéhenno, une vraie terre de paysans, âpre, chantée par Chateaubriand, en voisin.
Cœur bleu est un carnet de voyage qui se lit comme un poème en prose, les photos sont des œuvres d’art, sauvages presque irréelles. La plus belle peut être, les « Fougères d’or» et les plus émouvantes, en même temps artistiques, les clichés de profil du maître des lieux et de la grand-mère de l’auteur. Ce n’est pas un hasard. Ce Cœur bleu a une âme pour l’éternité. Les Flégés, mai 2023 /mars 2024
Points forts
Une poésie infinie se dégage de ces textes à la fois forts et délicats, profonds et impertinents parfois, et de ces photos très graphiques, naturelles dans leurs postures, modernes dans le cadrage et le traité des couleurs. Un vrai travail d’artiste, raffiné et émouvant, avec ce bleu « accélérateur d’imaginaire ». Une œuvre très personnelle aussi car Amaury Da Cunha est un peu chez lui, ici. Ce qui explique sans doute ce ton de la confidence plein de pudeur et de retenue comme si ce découvreur qu’est le photographe pouvait craindre d’être accusé d’effraction ou d’indiscrétion.
Un mot sur les photos effectuées « en basse lumière pour sa douceur et son originalité » avec un « petit boîtier qui diffuse une lumière bleue et presque aucune retouche », nous confie l’artiste. Magique !
Le culte de la famille, la restitution d’une ambiance mystérieuse d’une harmonie particulière propre à cette Bretagne en dehors des sentiers battus avec ses elfes et ses légendes, on n’est pas encore chez Merlin l’enchanteur et les chevaliers de la Table Ronde mais pas très loin. D’ailleurs la propriété de famille dont il est question recelait des trésors dont un seul a été retrouvé mais quel trésor !
De grandes questions en suspens faisant référence à l’histoire des lieux, comme celle-ci « il se demande pourquoi les reliques de Saint Modeste, mort à Jérusalem en en 634, se retrouvent ici dans cette petite chapelle des Flégés construite en 1704 ». Qui sait ?
Quelques réserves
Aucune. Bon sang ne saurait mentir surtout le sang bleu !
Une illustration
Une phrase
vendredi 20 octobre
« On prélève des images comme on ramasse des oiseaux tombés du nid. Devant l’image inerte, l'œil papillonne. Le photographe a inventé une vision intermédiaire entre le sommeil et la mort. A propos du titre j’en ai trouvé un pour cette aventure: « Les prémices, Cœur bleu ».
J’entends aussi «promesse». Cœur bleu, c’est celui qui se trouve soudé au mur de la chapelle, relique en plomb d’un cœur inconnu.
On dira qu’il bat aujourd’hui sous mes globes oculaires. » Page 53
L'auteur
Amaury da Cunha est journaliste culturel au journal Le Monde et écrit notamment dans Le Monde des livres, il fait partie d’ailleurs du jury du prix décerné chaque année par le titre ; il est de son côté l’auteur de Baby farmer (2021, Plein jour /Livre de poche), écrit à l’occasion d’un voyage d’études en Australie (ouvrage chroniqué par Culture-Tops et d’Histoire souterraine (2017, Le Rouergue). Il est également photographe artistique, expose souvent à la galerie Filigranes par exemple (cf. Incidences, Pays perdu 2025).
Cœur bleu, voyages en Bretagne, est publié aux Éditions Filigranes - 2025 à Paris. Conception graphique de Patrick Le Bescont. Réalisé grâce au soutien du Conseil régional de Bretagne, de Vitré communauté et de la Drac
Ils viennent de sortir
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