Une Odyssée

Mon père, ce héros...
De
Daniel Mendelsohn
Editions Flammarion - 418 pages
Notre recommandation
5/5

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Thème

L’auteur-narrateur, professeur au Bard College de New-York, est chargé, en 2011, d’un séminaire sur l’Odyssée d’Homère. A sa grande surprise, son père, Jay, âgé de 80 ans, qui vit d’ailleurs sa dernière année, lui demande d’y assister. Assis dans un recoin de la salle, il bougonne et n’intervient que pour critiquer Ulysse, qu’il semble détester. D’après lui, comment  considérer comme un héros, un homme qui part de chez lui, passe son temps à mentir, trompe sa femme, perd tous ses hommes et triche grâce à l’aide des dieux ? 

Dan, son fils, est persuadé qu’il ne peut rien apprendre à son père sur cette épopée dont il connaît pourtant toutes les richesses, tous les détours, tous les secrets. Il réussira à l’emmener en croisière « sur les traces d’Ulysse », mais là encore, Jay préfère l’ambiance sur le bateau aux visites des sites, qu’il juge décevants. 

Tels Ulysse et Télémaque, le père et le fils se reconnaîtront-ils au terme de cette année passée ensemble à la lumière de l’Odyssée, cette « grande épopée de l’identité », et à l’occasion de cette croisière mémorable ? Les souvenirs autobiographiques, mis en parallèle avec les différents épisodes du récit mythologique, les témoignages familiaux ou amicaux, ainsi que les réactions des étudiants du séminaire, ne seront-ils pas les clés indispensables pour comprendre enfin l’énigme paternelle ?

Points forts

• Les analyses brillantes de l’Odyssée du professeur Mendelsohn passionnent autant ses étudiants que ses lecteurs. Il insiste sur la composition circulaire de l’œuvre et approfondit ses thèmes essentiels : le voyage et les questions qu’il pose, comme la destination plus importante que le déplacement ou le goût de l’aventure par rapport aux plaisirs du foyer ; le passage du temps par rapport à l’identité d’un être ; la dissimulation et la reconnaissance ; la ruse supérieure à la force ; la vengeance comme puissant moteur narratif …

• « Mon père, ce héros » pourrait être le titre de ce livre. Pendant de (trop) longues années, sévère, rigide, exigeant et peu démonstratif, son fils en a peur ; mal habillé et dépourvu de la moindre distinction, il en a honte. En plus, un fossé se creuse entre eux : Jay, le scientifique rigoureux n’a jamais compris les goûts littéraires de Dan, qui s’est d’ailleurs cherché des pères de substitution. La quête menée à travers l’Odyssée permettra pourtant à l’auteur de découvrir que, comme mari et comme père de famille, cet homme fidèle aux faits et à ses devoirs, était un « héros taciturne ».

• Des passages magnifiques sont consacrés au rôle du professeur, partagé entre la transmission de tout ce qu’il sait et la volonté d’apprendre à ses élèves à penser par eux-mêmes. Il peut aussi les initier à la beauté, par le bonheur qu’elle procure. L’enthousiasme que Daniel Mendelsohn a ressenti lui-même pour le grec et sa grammaire, en est un exemple convaincant, puisqu’il évoque « une découverte éblouissante. »

• Des questions le taraudent sur le couple, celui d’Ulysse et de Pénélope, et celui de ses parents, qui a duré 64 ans ! Qu’est-ce qu’un mariage réussi ? se demande-t-il. La clé semble être, d’après lui,  la communauté d’esprit des époux, et le socle, leurs goûts communs, leurs codes, leurs secrets et leurs souvenirs.

Quelques réserves

Je n’en vois pas.

Encore un mot...

Daniel Mendelsohn entrelace, en véritable virtuose, l’histoire d’Ulysse, de son vieux père Laërte et de son fils Télémaque, avec la sienne : les deux « épopées » sont traitées en miroirs. Ce sont deux quêtes dans le temps et dans l’espace : comment peut-on connaître le passé d’une personne, même son père ? L’auteur des Disparusnous propose un livre merveilleux, enrichissant, souvent drôle et bien rythmé dans ses allers et retours entre l’individuel et l’universel. L’hommage vibrant à ses parents, à ses mentors et à ses professeurs, à qui il doit tout, ne peut que toucher profondément le lecteur.

Une phrase

« Je me remémorai tout ce que j’avais pensé cacher à mon père au fil des ans, alors qu’il avait toujours tout su … Un père fait son fils, avec sa chair et son esprit, puis il le façonne avec ses ambitions et ses rêves, avec sa cruauté et ses échecs, aussi. Mais un fils … ne peut jamais connaître totalement son père … Pas étonnant que les Grecs aient pensé que peu de fils sont l’égal de leur père ; que la plupart en sont indignes, et trop rares ceux qui le surpassent. »

L'auteur

Né en 1960, Daniel Mendelsohn est professeur de littérature classique à Bard College et contribue à la célèbre New York Review of Books. Il a obtenu le prix Médicis étranger pour Les Disparus en 2007.

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