FRAGILE

Un insolite roman du confinement
De
Camille Rousset
Éditions Hélichryse,
Parution le 15 janvier 2021
310 pages
20 euros
Notre recommandation
4/5

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Thème

Le confinement dû à la crise sanitaire de 2020 a été une période source d’écriture, de critiques, de remises en cause sociales ou personnelles. Cette période a aussi été l’occasion de confessions, voire de “journaux de confinement” écrits au jour le jour, parfois à l’origine de conseils de développement personnel ou aux recettes de pain au levain à faire chez soi. Ici, il n’est pas question de s’attarder sur l’opportunité politique du confinement, ou encore de donner des instructions à suivre si cette situation devait se reproduire. Dans un roman qu’on devine autobiographique sous forme de chapitres courts ressemblant à des poèmes en vers libres, l’auteur propose un récit personnel plus profond, analyse les pensées et les réflexions sur sa propre vie, mais aussi sur celle des autres, qui émergent dans ce moment d’exil inattendu.

Points forts

  • Ce texte tient tout d’abord sa force de son originalité indéniable. Une suite de réflexions, sous forme de petits chapitres comme des poèmes, mais qui ont entre eux la cohérence d’une histoire. La liberté de ton est sans doute le caractère le plus marquant de ce texte, qui traite du présent, du passé, de l’avenir, avec une sensibilité et une sincérité indéniables. Il interroge les coïncidences, la synchronicité d’histoires vécues par différentes personnes, la peur des sarcasmes qui peuvent s’acharner sur tout ce qui ressemble à de l’honnêteté. En étant intime et factuel, il parvient à atteindre une sorte d’universalité du doute, du chagrin du deuil, de la mélancolie ou de l’espoir.
  • L’auteur ne se borne pas à explorer sa propre sensibilité et cite d’autres auteurs, afin de donner du souffle à son texte. On retrouvera ici George Sand, Alfred de Musset, Marcel Proust, ou encore Nietzsche, mais aussi d’autres écrivains ou essayistes plus contemporains, qui pourront nourrir notre curiosité. Il s’agit ici de plonger au cœur de l’exil des écrivains, toujours dans un recul étrange quant à la réalité qu'ils vivent. 
  • On appréciera également la lucidité et l’intelligence de cette réflexion sur la solitude pure, la saturation intérieure que cette situation d’isolement suscite. Le texte analyse avec justesse le fait que le confinement nous ramène aussi aux sentiments d’isolement passés, ceux que nous avons pu percevoir au milieu de la société, lorsqu’il nous était impossible de nous sentir en harmonie avec des conversations animées, lorsque nous ne pouvions pas être intégrés dans le monde qui nous entoure. Le confinement réveille les angoisses et “nous fait aller dans nos peurs les plus primaires, celles de la mort, de la maladie, de l’autre, des autres, de l’inconnu, de l’imprévisible, du manque”, et c’est également pour cela qu’il nous fait parfois percevoir l’essentiel. 

Quelques réserves

Le livre, très original, dont la structure et la teneur sont très libres, pourra décontenancer certains lecteurs habitués à des points de repères littéraires plus classiques. 

Encore un mot...

Un livre riche et surprenant sur le confinement, pour sortir avec poésie des sentiers battus.

Une phrase

«Dans ce confinement, je m’offre de laisser surgir le monde de l’invisible, qui vient me parler et m’envelopper. Dans le monde suspendu. Pas une voiture, le bruit du vent et des oiseaux, dans ce printemps majestueux, qui reprend sa juste place. Je me souviens de ce matin, nous étions à la piscine avec ma fille encore toute petite, elle ne savait pas nager. Nous étions parmi d’autres familles et ces enfants qui hurlaient, c’était abrutissant. Puis, la scène est devenue un ralenti, l’agitation s’est transformée en scènes aquatiques de toutes sortes, j’étais amoureuse, mon esprit s’évadait vers d’autres possibles dans la musique et le tourbillon des mots. Je suis restée dans cet état suspendu jusqu’au retour à la maison, j’ai ouvert mon ordinateur et j’ai posé l’inspiration qui me venait de l’eau”. p. 98.

L'auteur

Camille Rousset est avocate depuis 1996, spécialisée dans le secteur du droit social. Elle a notamment exercé cette profession à Milan, puis à Lyon. Elle assure des formations auprès des entreprises et à l’Université, ainsi qu’en écoles de commerce. Elle intervient aussi en qualité de médiateur dans le cadre de la gestion de crises dans le milieu du travail, plus spécifiquement dans le secteur de l’économie sociale et solidaire et de l’art. Parallèlement à ses activités professionnelles, elle est écrivain, mais également auteur-compositeur-interprète, sous son nom de scène “Mademoiselle Balladin”. Elle anime des ateliers d’écriture et de chant auprès d’adolescents et de jeunes enfants pour Arts et Enfance, une association qu’elle a fondée en 2007, et qui aide à la résilience par l’intermédiaire de la création artistique.

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