La Virtuose
Avril 2025
384 pages
21,90 €
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Thème
En ce début de XVIIIe, la musique s'élève au cœur de Venise et dans ses palais. Les notes, telles des bulles de couleurs, éclatent, exécutées par une toute jeune fille sous la férule d'un Maître : Antonio Vivaldi.
Venise la Sérénissime, est, alors, un mélange de riches palais et de bouges sordides dans lesquels puissants et gens du peuple se croisent. Des prostituées, des filles perdues par des grossesses non désirées, ont peu d'options en ce qui concerne les enfants illicites : soit le nouveau né est noyé dans la lagune – en particulier les petites filles – soit il est abandonné avant l'âge de trois semaines afin que l'enfant puisse encore passer par le trou creusé dans le mur de la Pietà.
La Pietà, orphelinat où sont recueillies et élevées ces petites filles afin d'en faire de bonnes épouses mais aussi, pour celles qui en ont le talent, pour former de brillantes musiciennes sous la férule de maîtres de musique dont le célèbre compositeur Antonio Vivaldi. C'est ainsi que la petite Anna Maria della Pietà, repérée par le Maître pour ses aptitudes exceptionnelles, intégrera dès l'âge de 13 ans la prestigieuse formation des Figlie di coro.
Rongée par son ambition dévorante, Anna Maria sacrifiera tout pour la musique. Elle évincera toutes ses rivales mais aussi trahira ses plus proches amies pour atteindre son but : devenir Maestria. Violoniste hors pair, compositrice de talent, elle n'en est pas moins un jouet aux mains d'un Maître dur et peu scrupuleux, ignorante du fait que la société dans laquelle elle évolue est avant tout un monde d'hommes.
Points forts
Ce roman construit à partir d'une base historique solide dépeint en détail les us et coutumes de la Venise de cette époque. La Pietà ainsi que l'institution des Figlie di coro ont bien existé conférant au destin romancé d'Anna Maria une certaine véracité.
L’approche psychologique d'Anna Maria est très contemporaine : on comprend que le passage de l'enfant dans le trou du mur de la Pietà symbolise une seconde naissance. De même, à l'heure où la psychanalyse n'existe pas, on ressent fortement le traumatisme de sa prime enfance au travers de sa phobie de l'eau et de sa crainte de la noyade.
La cruauté qui est au centre du monde d'Anna Maria est contrebalancée par la poésie induite par les notes de musiques identifiées comme des couleurs par la jeune fille.
Quelques réserves
L'angle psychologique du roman adopté par l'auteure peut sembler par moment anachronique par rapport à l'époque.
Encore un mot...
Le phénomène d'association des notes de musiques à des couleurs est un phénomène connu sous le nom de synesthésie. C'est une aptitude surprenante et fascinante du cerveau humain à créer une association singulière entre une perception et son expression. Cette approche extrêmement bien décrite dans ce roman confère à celui-ci une grande originalité.
Une phrase
« Elle le lève et le sent se nicher de lui-même dans le creux sous son menton, comme si ç'avait toujours été sa place. Chaque crin de l'archet est parfaitement lisse, tendu. Elle approche la mèche des cordes et décide de jouer un fa, un rouge aussi profond que la couleur de l'instrument. Dès que l'archet frotte les cordes, elle les sent vibrer à travers elle alors que le violon s'éveille et révèle sa voix. Le son est liquide, lumineux, sublime. Le rouge qu'elle espérait voir apparaît devant elle. Mais voilà qu'il tremble et se fragmente devant ses yeux en une myriade de nuances dorées, auburn et bordeaux. Une âme qui prend vie. » P.142
L'auteur
Harriet Constable, journaliste et cinéaste, a écrit pour le New York Times, The Economist et la BBC. Primée, membre de la Royal Society of Arts, elle a par ailleurs été initiée très jeune à la flûte par sa mère, elle-même pianiste et chanteuse. On comprend ainsi pourquoi la musique est le thème central de ce premier roman.
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