Hourra l'Oural encore

En route pour l'Oural avec un amoureux de la Russie, de son peuple et de sa littérature. Un voyage intéressant et émouvant
De
Bernard Chambaz
Paulsen -
173 p. -
19,50 €
Notre recommandation
3/5

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Thème

C'est Hourra l'Oural, un recueil de poèmes qu'Aragon a publié en 1934 au retour de son voyage en URSS, qui a inspiré à Bernard Chambaz le titre de ce récit : Hourra l'Oural encore. Dans ses poèmes, Aragon exaltait l'oeuvre de la Révolution russe et de l'URSS en construction dans les années Trente. Avec le temps, Aragon sera plus nuancé et reviendra sur son exaltation originelle.

Bernard Chambaz n'hésite pas à rudoyer la poésie de propagande d'Aragon. Lors de son tout récent voyage il constate, lui, les difficultés économiques et sociales rencontrées par les habitants de l'Oural, victimes des années de la déliquescence de l'URSS et trop oubliés par le régime russe actuel.

En train, car, taxi, tramway, accompagné de «son amoureuse» (sa femme) et de guides, il parcourt les villes et les monts de l'Oural, frontière entre l'Europe et l'Asie et vieux territoire à la géographie et à l'histoire trop méconnues.

Une carte, bienvenue, retrace ses voyages en hiver puis en été : Moscou, Perm, Berezniki, Verkhotourié, Ekaterinbourg, Moscou, Perm II, Ekaterinbourg II, Tcheliabinsk, Magnitogorsk, Abzakovo, Oufa.

Nous suivons les traces de 2 écrivains (Pasternak et son Docteur Jivago et Chalamov et ses Récits de la Kolyma); de fantômes (les Romanov à Ekaterinbourg et les victimes du goulag Perm-36) ; de Lénine dont quelques statues demeurent ; de Saint Siméon au monastère de Verkhotourié et de l'Homo sovieticus, sorte de dinosaure folklorique pour les jeunes générations.

Bernard Chambaz raconte aussi des saynètes de la vie quotidienne dans l'Oural, ses rencontres prévues ou imprévues, ses guides qui aiment tant la France, Gérard Depardieu et la Tour Eiffel. Il visite un champ de météorites, un musée de tracteurs soviétiques, un site archéologique, le grand musée de Bachkirie « qui résume à lui seul le génie de la muséographie russe ». Il écoute les balalaïkas et chante Kalinka. Il apprend, avec grand plaisir, que Eltsine fut un écolier indiscipliné et aventureux. Il admire sous le ciel nuageux la Kama gelée. Il se régale de canapés de caviar rouge, de cornichons, de salade russe et de petits verres de vodka...et son admirable amoureuse est toujours vaillante malgré son genoux enflé - un épanchement de synovie car ils ont aussi beaucoup marché!

Points forts

L'érudition de l'auteur et sa tendresse saupoudrée de poésie, de légèreté, de dérision, de mélancolie et de tragique – le propre de l'âme russe?- sont évidemment séduisants dans cette balade culturelle écrite à la perfection. Bravo l'artiste ! ...

Quelques réserves

...Cependant on reste sur sa faim. On survole à tire d'aile les Monts d'Oural dans ces, seulement,173 pages.

Encore un mot...

A force de s'attacher au style et au rythme d'un road-movie rapide, sympa, vivant, Bernard Chambaz nous étourdit un peu avec son tempo vivace ...mais excusons-le, il aime tellement la Russie!

Une phrase

"La dernière heure de la dernière nuit, je la passe à la fenêtre, devant le paysage de la cheminée dont la colonne s'illumine en rouge et blanc, alternativement. Ce spectacle minimal de magie pure m'apporte une énième réponse à la question rituelle : pourquoi voyager. Oui, on voyage aussi pour ça, rester debout, torse nu, à contempler une cheminée d'usine qui clignote comme un sapin de Noël. Et j'en suis heureux. Même si je sais bien que je n'ai pas achevé une traversée ni bouclé une boucle, juste fini une espèce de balade en deux temps, hiver et été, passé et présent, un arc de cercle, un simple fragment de méridien, peu ou prou le 56ème Est, moins exotique que le Kamtchatka, mais tellement humain.

Minuit, on est déjà demain. Mon amoureuse s'enfonce dans son premier sommeil. Je relève le drap sur son épaule et je range dans mon sac à dos la carte de l'Oural. Par la force des choses, j'ai du mal à m'endormir". (p.172)

L'auteur

Bernard Chambaz, né en 1949, est romancier, essayiste, poète et historien. Il a reçu le prix Goncourt du premier roman en 1993 pour L'Arbre de vies (F. Bourin) et le prix Jouvenel de l'Académie française en 2014 pour Dernières nouvelles du martin-pêcheur (Flammarion). Ne serait-ce que depuis 2015, il a publié : Vladimir Vladimirovich (Flammarion, 2015) ; Etc.(Poésie, Flammarion 2016) ; Petite philosophie du ballon (Champs essais, 2018) ; Petite philosophie du vélo(Champs, 2019) ; ET (Poésie, Flammarion, 2020).

En 1964, Bernard Chambaz part en URSS dans un camp de Pionniers (les Pionniers étaient, à cette époque, les membres d’une organisation de jeunesse communiste inspirée du scoutisme) et, depuis l'an 2000, il voyage souvent en Russie avec son amoureuse.

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