La Renverse

Un roman remarquable, qui bouscule
De
Olivier Adam
Editions Flammarion - 267 pages
Notre recommandation
4/5

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Thème

Solitude, silence, indifférence caractérisent l’existence morne d’Antoine, le narrateur trentenaire, qui occupe vaguement son temps en Bretagne entre une librairie et Chloé, avec laquelle il ne partage presque rien. La radio lui apprend la mort de Jean-François Laborde, ancien maire de la ville de grande banlieue parisienne, où il a grandi. Tout le passé maudit, qu’il a fui une dizaine d’années auparavant, revient à la surface … Sa mère a été, en effet,  mêlée à une affaire scandaleuse d’abus sexuels, commis par Laborde sur deux employées municipales, alors qu’elle était son adjointe et sa maîtresse. Il raconte comment sa famille a été non seulement éclaboussée, mais détruite par ce fait divers sordide. Il s’intéresse surtout à l’entourage des deux protagonistes, à leur famille, à leurs enfants, victimes innocentes, qu’une telle « déflagration » a atteints de plein fouet.

Points forts

• Un très beau titre symbolique : la renverse, l’étale.

• Les questions que le narrateur se pose sur sa mère : comment une femme parfaite, « mère de famille modèle, paroissienne accomplie, citoyenne impliquée », a-t-elle pu devenir la maîtresse perverse et brutale du maire ?

• Les questions sur lui-même : pourquoi a-t-il refusé si longtemps de croire à la culpabilité de sa mère, contre toute évidence ?

• On retrouve avec force les thèmes chers à ce romancier : les blessures de l’enfance, le silence assourdissant entre les parents et les enfants, leur pudeur maladive, l’absence totale de tendresse, d’intimité, de confiance. Ils vivent côte-à-côte et gardent leurs secrets, leurs mystères, leurs contradictions.

• L’individualisme des adultes soixante-huitards contents d’eux, qui ne pensent qu’à leur plaisir et se moquent de leurs enfants.

• Une classe politique corrompue, préoccupée par ses petits arrangements, au détriment  de l’intérêt général.

• Olivier Adam dépeint aussi bien les paysages sauvages des côtes bretonnes que les zones pavillonnaires de la grande banlieue parisienne.

• Un ton doux amer, très personnel, singulier, juste, qui touche le lecteur, et un style harmonieux ou tranchant selon les sujets abordés.

Quelques réserves

• Le fait divers choisi semble un peu trop proche de la réalité (l’affaire Tron) : les pages qui lui sont consacrées accrochent moins le lecteur.

• Des redites, une impression répétitive, peut-être un manque de rythme.

• Le personnage de Laetitia, la fille du maire, paraît moins vraisemblable que les autres.

Encore un mot...

Olivier Adam parvient à rendre attachants des personnages à la dérive, des êtres fragiles, brisés par leurs espoirs déçus, trop sensibles, incapables d’exprimer leurs émotions et d’affronter les épreuves de la vie; mais ils tentent de se reconstruire, en effaçant leur passé difficile et en cherchant désespérément de la tendresse, du coup ils nous bouleversent. L’auteur réussit aussi à nous embarquer dans son univers toujours proche des « lisières » avec talent. Un roman qui bouscule!

Une phrase

« J’ai continué à errer pendant des heures dans cette ville où s’était jouée mon enfance, traquant le moment où elle aurait quelque chose à me dire, à me révéler … Mais à travers elle, c’était envers mes parents que je cherchais à éprouver quelque chose, je le savais bien. Un attachement. Une filiation. Une nostalgie. De la pitié. De la honte. De l’amour ou de l’affection. » p.221

L'auteur

Né en 1974, Olivier Adam publie là son douzième livre, après, entre autres, Je vais bien, ne t’en fais pas (2000), adapté au cinéma, Falaises (2005), Des vents contraires, Prix RTL/Lire 2008, Le cœur régulier (2010), Les lisières (2012), Peine perdue (2014).

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