La Veille de presque tout

Dommage qu'il y ait cette démesure
De
Victor del Arbol
Editions Actes Noirs–Actes Sud - 307 pages
Notre recommandation
3/5

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Thème

Germinal Ibarra,  flic en Corogne, s’est rendu célèbre pour avoir résolu l’affaire d’un meurtre d’une petite fille victime d’un pédophile. Quelques années plus tard, il est appelé au chevet d’une femme grièvement blessée. Il reconnait  Eva Mahler, la mère de la petite victime. Que lui est-il arrivé ?

L’histoire va nous conduire jusqu’à Punta Caliente, lieu sauvage de Galice, où se croisent Maurizio, un vieux chapelier argentin rescapé de la dictature argentine, Daniel, son étrange petit-fils, Dolorès dont la fille a également disparu et l’énigmatique Paola qui n’est autre que le nom d’emprunt d’Eva qui a fui son milieu de riche héritière. Des personnages aux histoires parallèles et imbriquées, tous hantés par leurs fantômes et portant en eux une souffrance obsédante venant du passé.

Points forts

- L’auteur réussit à créer une atmosphère particulière, très oppressante. Nous avons l’impression d’avancer dans un cauchemar rempli d’ombres ou chacun poursuit sa route péniblement en tentant de raccommoder ses blessures.

- Les histoires s’emboîtent bien malgré les multiples ramifications. 

- Maurizio, le vieil argentin, retrouve un tortionnaire et, sans vouloir se venger, lui fait prendre conscience du mal qu’il a engendré. Une belle idée que de ne pouvoir accorder son pardon que si le bourreau se sent responsable. L’image des retrouvailles et de la prise de conscience est très forte.

- On comprend rapidement  qu’Ibarra a réglé son sort au pédophile. On compatit avec l’acte mais aussi  avec la  souffrance qui en découle, le ronge et le conduit à rêver d‘en finir avec l’existence. Comme tous les personnages de ce roman,  il est tiraillé entre vengeance et culpabilité.

Quelques réserves

- Trop de surenchère dans le désespoir, le roman est jalonné de disparitions, de torture, de meurtres. Trop de situations dramatiques : la violence familiale, les pathologies médicales.   Aucun personnage n’est épargné.  Une vision bien noire de l’homme même si l’auteur semble s’inspirer de son vécu dans des quartiers défavorisés. 

- Le roman nous tient éveillé mais il ne repose que sur son aspect tragique, présent à chaque page. S’il y a quelques mystères, il n’y a pas vraiment d’intrigue policière ni de rebondissement.

Encore un mot...

Il ne s’agit pas d’un polar classique. L’auteur cherche plutôt à creuser la psychologie de ses personnages qui ont tous en commun une souffrance intérieure. Ce roman, d’une grande noirceur, a pour  fil conducteur l’existence hantée par le passé. Des interrogations sur la difficulté de vivre quand on porte en soi les stigmates de l’histoire comme la torture dans un régime autoritaire ou des souffrances quotidiennes de la vie, en l’occurrence des événements graves tels que le viol, le meurtre, la disparition ou l’éducation d’un enfant handicapé. 

La question qui se pose tout au long du roman est donc de savoir si on peut  se libérer du passé sans chercher à l’effacer mais il est dommage qu’elle soit posée dans la démesure.

Une phrase

«  Il aimerait s’inventer une bulle où le passé n’existerait pas, comme si on y dormait d’un long sommeil paisible dont on ne serait pas obligé de se réveiller » page 104

L'auteur

Victor del Arbol est un romancier espagnol, ancien séminariste puis fonctionnaire de police du gouvernement de la Catalogne. Il devient écrivain en 2006. Il a été distingué par le prix du polar européen en 2012 et par le grand prix de littérature policière du meilleur roman étranger en 2015.

Son dernier ouvrage ,« La veille de presque tout », vient d’être récompensé par le Prix Nadal, équivalent du Goncourt en Espagne.

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