Un autre m’attend ailleurs
Parution le 23 août 2024
300 pages – 20.00 €
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Thème
Marguerite Yourcenar vit aux Etats-Unis dans sa propriété de Petite Plaisance aux côtés de Grâce Frick, sa traductrice. Après la mort de sa compagne, un journaliste de la télévision française vient l'interviewer, accompagné de Jerry Wilson, un jeune photographe homosexuel de trente ans qui lui rappelle un amour de jeunesse malheureux. La grande dame de la littérature française, au caractère si bien trempé, en tombe alors amoureuse et l’engage comme secrétaire particulier, en charge d’organiser ses voyages. C’est ainsi qu’à l’âge de soixante-seize ans, elle va se découvrir une âme de midinette.
Points forts
La description de leurs nombreux voyages en Europe, en Extrême Orient, en Afrique, toujours dans des conditions de luxe dignes d’un couple royal, reçus dans les plus grands hôtels ou dans les ambassades de France.
Le sens du portrait : les caractères sont très marqués sans être pour autant obligatoirement sympathiques :
Une Marguerite Yourcenar qui refuse de se définir comme féministe, hypocondriaque, égoïste, un brin superstitieuse et assez imbue de sa personne,
Un Jerry Wilson semblable au cavalier polonais de Rembrandt mais sujet à des colères monstrueuses, très enfant gâté, qui impose Daniel à sa bienfaitrice, les deux amants profitant honteusement des libéralités de Marguerite.
Grace Frick, exigeante du fait de son dévouement à sa compagne qui doit supporter ses humeurs difficiles par reconnaissance.
Mathieu Galey, le critique du Masque et la Plume, taxé de paradoxe vivant, expédié en quelques mots antinomiques « misanthrope et mondain, dandy raffiné et vulgaire commère, homosexuel subversif et fils à papa droitier », tout comme André Fraigneau, conseiller littéraire de Grasset, ainsi décrit « homosexuel misogyne, antisémite et fasciné par l’uniforme »
Quelques réserves
Pour rappel, voici les qualifications officielles de Marguerite Yourcenar :
De l'Académie française
De l'Académie royale belge
Grand prix de Littérature de l'Académie française (1977)
Grand prix national des Lettres (1974)
Prix de la Fondation Érasme
Prix de la Fondation prince Pierre de Monaco (1972)
Prix du meilleur écrivain européen (1987)
Il semblerait que l’improbable « love story » qui fait l’objet de ce livre tienne peu de place dans les différentes biographies, exégèses et autres chroniques consacrées à Yourcenar qui, de toutes façons, domine de très haut la plupart de ses commentateurs.
Cet ouvrage assez artificiel, aux anecdotes fabriquées me paraît être le reflet de la vision très personnelle de Christophe Bigot qui tient absolument à déceler un amour fou dans ce qui ne fut sans doute que le dernier faible d’une vieille dame pour un jeune collaborateur attachant.
Encore un mot...
Ce « Roman vrai » qui réduit un écrivain majeur au rôle de midinette ne semble guère coller à la réalité et me paraît un peu inutile.
En fait, Jerry Wilson mort en 1986 à trente-six ans n’a laissé sa trace que dans un petit livre paru en 1987 La Voix des choses, recueil de citations chères à Yourcenar, illustrées de photos de Jerry et qui fut leur dernière collaboration.
Une phrase
p. 287 (après la mort de Jerry, emporté par le Sida)
« La voilà seule pour la troisième fois de sa vie. Après Michel qui a fait d’elle une femme libre, après Grace, la compagne plus solide qu’un roc, son île et son continent tout à la fois, voilà que celui qui aurait dû, jusqu’à son dernier jour, lui tenir lieu de bâton de vieillesse, celui qui incarnait à ses yeux la beauté et la jeunesse éternelle, lui fait irréparablement défaut ».
L'auteur
Né en 1976, Christophe Bigot est Professeur de littérature, normalien et titulaire d'une agrégation de lettres. Il est l’auteur de sept romans, dont deux consacrés à la Révolution française, L'Archange et le Procureur a reçu le Prix Mottart de l'Académie Française en 2008.
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