
Le Passé
Durée 4h20 (2h20 / entracte / 1h30 ; spectacle surtitré en anglais)
Infos & réservation
Thème
- Créé au théâtre national de Strasbourg en 2021 et inspiré de la pièce de Léonid Andréiev, écrite en 1912, avec l’ambition d’un « nouveau drame pour un nouveau théâtre », ce spectacle met en scène la dérive d’une femme Ekaterina Ivanovna qui parvient à s’échapper, alors que son mari, député à la Douma, veut la tuer parce qu’il est convaincu de sa trahison.
- Choquée, elle devient ce qu’il lui reprochait d’être : une femme infidèle, amorale sans retenue ni limite.
Points forts
Une mise en scène esthétisante, dynamique et éblouissante, pleine d’innovations scéniquess et technique, portée par un texte puissant et fluide, captivant.
Des comédiens à forte présence, en particulier Victoria Quesnel dans le rôle principal d’Ekaterina Ivanovna, qui évoluent dans une étrange atmosphère où le normal et l’anormal alternent curieusement.
Les caméras derrière la scène démultiplient l’espace scénique et les points de vue.
Quelques réserves
Un dispositif un peu répétitif de “scène derrière la scène“ relayé par des vidéos mêlant les genres si bien que ce qui est étonnant au départ devient lassant, voire disproportionné.
La transposition des codes moraux du début du XIXe siècle peine à convaincre aujourd’hui, de même que les notions de “péché“ ou de “débauche“.
Le jeu, exclusivement centré sur la possession diabolique, dans laquelle s’enchâsse un autre récit avec des comédiens masqués, parasite et détourne le récit principal.
Rappelons que des scènes peuvent heurter la sensibilité de certains spectateurs.
Encore un mot...
La femme adultère des existences bourgeoises, “à la Tchekhov“, constitue un thème de prédilection pour le théâtre européen. Lorsque le drame prend une dimension psychologique et menace d’anarchie le foyer, seule la lecture religieuse donne son sens à la « débauche » - œuvre du diable - puis à la libération en vertu de la vision orthodoxe, où le péché et le pardon doivent ouvrir le chemin de la rédemption.
Une double réflexion guide le propos signifiant le renouveau théâtral par la disparition de la tradition et l’éclatement des repères.
Une phrase
- « Je me sens encore comme ces jeunes cinéastes à propos desquels on dit : “Le film est bien mais il veut trop en mettre.“ Et c’est vrai. Et je pense que c’est aussi lié à ma position très critique vis-à-vis du règne de la fiction. La première raison, c’est que tout le monde répète sans cesse que, dans le monde actuel, le rôle des artistes serait de raconter des histoires…, alors même que ce monde est déjà lui, profondément fictionnel. » (Julien Gosselin)
L'auteur
- Leonid Andreïev (1871-1919) est un écrivain et photographe russe, né à Orel, au sud de Moscou. Militant anti-tsariste puis antibolchévique, il devient avocat et se fait le défenseur des opprimés, puis passe à la chronique judiciaire, avant de découvrir sa vocation littéraire.
- Ses premières nouvelles, parues en 1901, traduisaient une hantise de la mort. Auteur à succès jusqu’en 1909, son œuvre connut le déclin et l’oubli après sa mort, en 1919, malgré l’attention que lui prête Hollywood à travers Victor Sjöström qui adapte une de ses pièces - Celui qui est giflé - dans un film intitulé Larmes de clown.
- « Je voudrais que les hommes blêmissent d’effroi en lisant mon livre, qu’il agisse sur eux comme un opium, comme un cauchemar, afin qu’il leur fasse perdre la raison, qu’on me maudisse, qu’on me haïsse, mais qu’on me lise… et qu’on se tue », écrivait, à l’âge de vingt ans, Leonid Andreïev dans son Journal.
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