
Petites misères de la vie conjugale
Adaptation et mise en scène : Pierre-Olivier Mornas
Durée : 1h10
Infos & réservation
Thème
Le propos se veut a priori austère : il s’agit d’une Physiologie du mariage, qui se veut une observation la plus fidèle à la réalité du fonctionnement d’une institution et de ses protagonistes, et ce dans le style d’un genre très prisé à l’époque, celui des Physiologies. Il est combiné avec les Petites misères de la vie conjugale, texte éclectique regroupant diverses publications de Balzac postérieures à sa Physiologie.
Pierre-Olivier Mornas a extrait la substantifique moelle de cet ensemble hétéroclite, en organisant la pièce en une dizaine de volets qui mettent en présence deux archétypes de conjoints : Caroline en “épouse modèle“ et son mari Adolphe, specimen et membre de la bonne bourgeoisie comme il s’en trouvait tant dans la France citadine sous la monarchie censitaire (1814-1848) ; la voix du Narrateur tire les leçons des tableaux successifs et fournit la transition entre les saynètes.
A présent que tous les ingrédients de l’expérience sont rassemblés, voyons ce que donne cette drôle de physiologie…
Points forts
Dans un décor fonctionnel et judicieusement conçu - divisé en quatre sous-espaces (un salon-garde robe, le pupitre, une arrière-scène occupée par la chambre à coucher, et l’avant-scène où se déroule l’essentiel de l’action) - Pierre-Olivier Mornas déroule les étapes de la vie conjugales, avec ses hauts (« l’été de la Saint-Martin du couple ») et ses bas (« la dernière querelle »).
La pièce crépite, le rythme est enlevé, les comédiens sont épatants, qu’il s’agisse d’Alice d’Arceaux ou de P.-Ol. Mornas, qui n’est pas sans rappeler Jean-Pierre Darroussin à son meilleur.
Le propos de Balzac - qu’on aurait pu croire daté et incapable de dépasser son époque - vaut aussi bien par l’observation acérée de la société de son temps et de son institution centrale (le mariage), que par la compréhension de la condition de la femme, et notamment de la femme mariée.
Si la voix du Narrateur, par laquelle s’exprime Balzac, est bien masculine, et souvent pleine d’indulgence envers ce brave bourgeois d’Adolphe, il n’en reste pas moins que Balzac décrit et pointe fort bien la situation d’épouses prisonnières de leur intérieur et du fameux article 213 du Code civil, disposant que l’époux doit protection à sa femme et celle-ci obéissance à son mari…
Quelques réserves
Si Petites misères il y a, il s’agit de celles subies par le public entassé au sous-sol du Poche, les genoux coincés contre les barres des sièges devant lui, le postérieur posé sur des banquettes peu confortables quand il ne s’agit pas de chaises métalliques sans doute empruntées en catastrophe au bar du théâtre, situé au rez-de-chaussée…
Encore un mot...
C’est un vrai petit bonheur que nous réservent ces Petites misères de la vie conjugale.
Une phrase
Caroline : « Le mariage est une institution nécessaire au maintien des sociétés.
- le Narrateur : … mais contraire aux lois de la nature. Unir pour toute la vie deux êtres qui ne se connaissent pas ?Caroline : « En amour, la femme est comme une lyre qui ne livre ses secrets qu’à celui qui sait en jouer…
- Adolphe [dépité] … La migraine, impôt conjugal. »Caroline [au début] : « S’aimer toujours, n’est-ce pas la plus téméraire des entreprises ?
[et à la fin] : « Le mariage, n’est-ce pas “la comédie des comédies“ ? »
L'auteur
Honoré de Balzac (1799-1850) est l’un des écrivains majeurs de la littérature française. Il n’eut pas son égal pour dépeindre la société française de son temps, comme en atteste la monumentale Comédie Humaine regroupant son œuvre.
- A partir de la cinquième édition de celle-ci fut intégré un essai publié en 1829 sous le titre de Physiologie du mariage ou méditation de philosophie éclectique, sur le bonheur et le malheur conjugal, publiées par un jeune célibataire. D’après ce qui précède, on comprend que l’étude rencontra un succès public à la hauteur du scandale provoqué par sa parution ! La pièce s’inspire aussi du recueil de publications écrites entre 1830 et 1846 par Balzac dans divers titres de la presse littéraire et satirique, et rassemblées sous le titre de Petites misères de la vie conjugale, qui est aussi celui de cette pièce.
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