Victor HuGOAT : N°1 du rap français
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Thème
Bart a deux passions : la littérature classique et le rap. « Invité » par une professeure, à la fois raide et fine, à préparer un exposé sur la vie et l’œuvre de Victor Hugo, il compose un rap, afin de faire la démonstration, s’il se peut, que le rap « n’est pas un bruit pour analphabète », mais bien une « nouvelle littérature. » : Bart tient à prouver que Hugo est « aussi stylé » que le plus accompli des rappeurs, tout en dépliant les beautés de la langue classique.
Dans cette espèce de conférence gesticulée et rappée, Bart explore quelques grands textes de de l’écrivain, en montrant sans excès didactique comment Hugo a tellement contribué à révolutionner la littérature de son temps que ses textes résonnent encore aujourd’hui.
A l’entendre, Hugo coche les « cinq F du rap français » : “Fric, Fame, Fougue, Fight, Femme“…
Au passage, on croise aussi les romantiques de 1830, porteurs du nouveau monde mais qui « schlinguent », et les rappeurs plus ou moins engagés : Jul, Booba, NTM, Assassins, Kerry James.
Points forts
L’ensemble, qui mêle les phrases de Hugo aux saillies savantes, pertinentes et drôles de Bart, est très astucieusement construit. La progression du récit de la vie du poète est parfaite et le choix des moments et des oeuvres à la fois surprenant et convaincant.
On n’échappe pas à « Demain dès l’aube », ni au récit hilarant et instructif de « la bataille d’Hernani », pas plus qu’à la résistance au coup d’état du 2 décembre 1851 et à la mort de Léopoldine. Mais les détours par le théâtre classique et ses conventions (d’ailleurs saluées) et même par Rimbaud, sont des moments plaisants et féconds, qui permettent de mettre en perspective l’histoire de la littérature. Pas de Misérables non plus, remplacés ici par le fameux discours prononcé par Hugo à l’Assemblée le 9 juillet 1849 sur la misère (il s’est depuis peu converti au républicanisme), qui met en évidence l’engagement de l’artiste.
La malice, la vivacité, la formidable gestuelle (le jeu de sourcils !) et la culture de Barthélemy Héran offrent aux spectateurs une (ré)-appropriation ludique, originale et musicale jouissive des textes de ce génie que fut Victor Hugo.
Parfois mis à contribution avec grâce, le public rit beaucoup, s’amuse, savoure la beauté et la justesse du texte et les moments de rap, et en sort réjoui après une longue standing ovation.
Quelques réserves
- La première séquence de la bataille de rap opposant Napoléon III « le petit » à Victor Hugo fait entrer directement dans le vif du sujet, et permet de nuancer le portrait de celui qu’on pourrait en effet considérer comme une « girouette politique », mais elle est un peu décalée par rapport à la suite dont le fil narratif est plus cohérent et prenant.
Encore un mot...
Comment mieux mettre en perspective, sans le statufier, le novateur que fut Victor Hugo qu’en le mettant en miroir du rap ? Les uns et les autres ont bousculé les codes de l’écriture et les rythmes, inventé de nouvelles formes syntaxiques et un nouveau lexique.
Il y a quelque chose de très émouvant à voir comment on peut ainsi réconcilier générations et cultures apparemment antagonistes autour d’une approche intelligente, informée et imaginative de ce monstre de la littérature française.
Une phrase
Bart :
- « Aimer c’est agir, agir c’est aimer voilà ce que pourrait rugir le monstre enflammé. »
- « Si Hugo avait vécu aujourd’hui, ç’aurait été le meilleur des rappeurs ! »Hugo :
- « La langue française n’est pas fixée et ne se fixera point. »
- « Je ne suis pas, messieurs, de ceux qui croient qu'on peut supprimer la souffrance en ce monde ; la souffrance est une loi divine ; mais je suis de ceux qui pensent et qui affirment qu'on peut détruire la misère. Remarquez-le bien, messieurs, je ne dis pas diminuer, amoindrir, limiter, circonscrire, je dis détruire. Les législateurs et les gouvernants doivent y songer sans cesse ; car, en pareille matière, tant que le possible n'est pas fait, le devoir n'est pas rempli. »
L'auteur
On a le sentiment que Barthélemy Héran et Grégoire de Chavanes sont de vieux (enfin pas si vieux) copains de lycée. Presque ! Les deux complices ont fait quasiment le même chemin : après des études dans des écoles de commerce (ESSEC et ADHEC) et un début de vie professionnelle dans des start up, ils se sont tournés vers le théâtre. Barthélémy Héran a fait le Cours Florent et, ensemble, ils ont écrit ce spectacle.
Récompensé par le prix du Jury aux planches de l'ICART 2024, Victor HuGOAT : N°1 du rap français a été présenté au festival d’Avignon en 2025, où il remporta un vif succès.
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