L’Islam et sa civilisation

Le livre, plusieurs fois réédité, et son auteur, islamologue réputé, sont des références
De
André Miquel
Armand Colin
Septembre 2023 (7ème édition, la 1re en 1968)
430 pages
27,90 €
Notre recommandation
4/5

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Thème

  • Comment appréhender l’Islam dans sa globalité et le comprendre comme un « système » sans le réduire à aucune de ses composantes ? C’est l’objectif et la réussite de cette somme que nous propose André Miquel, l’un des plus éminents connaisseurs d’une histoire toujours sensible et souvent méconnue.
  • Car l’Islam est tout à la fois une religion, une culture, une géopolitique, un espace … Il n’est réductible à aucune de ses époques ni de ses nations mais fait partie intégrante du monde dans lequel nous vivons.
  • Le livre dresse le portrait intégral de l’Islam dans toutes ses dimensions, de la naissance du prophète Muhammad jusqu’au XXème siècle et s’adresse aussi bien à ceux qui voudraient découvrir l’Islam qu’à eux qui souhaitent parfaire leurs connaissances.

Points forts

  • L’Islam et sa civilisation est un classique, puisqu’il en est à sa septième édition. Il est vrai que le livre se lit comme un roman qui englobe l’intégralité de l’histoire de l’Islam, dont on connait déjà la trame, avec certains événements et personnages comme points de repère.
  • Miquel allie à la précision minutieuse du détail une érudition sans faille qui lui permet de naviguer facilement entre les différentes périodes et thématiques que cette somme expose. La civilisation de l’Islam englobe en effet tous les aspects de la vie. Ce sont d’abord des conquêtes militaires au nom de la religion, qui se transforment en victoires politiques qui créent des dynasties qui aspirent à exercer durablement le pouvoir. Enfin, la conquête a généré de profonds échanges avec d’autres civilisations, qui ont fait des Arabes, des passeurs entre celle des Grecs et la Chrétienté.
  • Raconter L’Islam et sa civilisation, c’est faire défiler deux millénaires de l’histoire du monde, c’est comprendre les apports essentiels qu’il nous a transmis et comment il a contribué à modeler le monde existant, c’est apprécier une culture qui fût d’une richesse et d’une magnificence qui nous étonne encore aujourd’hui, c’est enfin mieux comprendre le monde dans lequel nous vivons et nous préparer à celui qui nous attend.
  • On peut considérer L’Islam et sa civilisation comme un ouvrage de référence.

Quelques réserves

  • Elles sont pourtant assez nombreuses, pour un ouvrage de cette qualité, car le sujet est d’une exceptionnelle complexité et l’embrasser tout entier est une mission quasi impossible.
  • Elles tiennent principalement au très peu de place accordée à :
    • la création d’Israël et des bouleversements qu’elle a créée, non seulement en Palestine mais dans tout le Proche-Orient avec leur impact sur les relations internationales ;
    • les nouveaux rapports de force ainsi créés avec la montée des nationalismes, intérieurs et extérieurs qui font l’actualité.
  • D’autant plus qu’une large place est accordée à la période du XIème au XVIIIème siècle, marquée par des changements et retournements perpétuels, un peu dur à suivre et à apprécier, sauf pour les spécialistes.
  • Le manque de lisibilité des cartes, l’absence d’illustrations et d’un lexique des noms propres (en complément celui, excellent des noms communs) sont également le signe qu’une mise à jour plus complète s’imposait (sans parler de quelques coquilles).

Encore un mot...

  • André Miquel se situe dans la lignée des grands islamologues que la France a donnés à cette civilisation. Il fait partie de cette génération « classique », avec Louis Massignon, Maxime Rodinson, Jacques Berque ou Dominique Sourdel (que j’ai eu la chance d’avoir comme professeur à la Sorbonne).
  • Ils ont également une descendance de qualité puisque François Burgat, Jean-Pierre Filiu, Gilles Kepel et Olivier Roy, qui sont nos contemporains, perpétuent cet attrait français, avec des échanges toutefois beaucoup plus polémiques, surtout entre les deux derniers cités.

Une phrase

  • Sur les premiers temps de l’Islam, page 50 :
    « En trente ans à peine, la communauté musulmane, crevant les cadres de l’Arabie originelle, se confronte à des destins nouveaux. Le plus grand est oriental, sans doute celui de la conquête qui pose alors les premiers jalons d’un empire oriental et méditerranéen. A cette aventure, à cet Islam en expansion dans des pays de très vieilles civilisations, il faut des chefs : la communauté n’en n’aura pas moins de quatre, dont trois mourront assassinés : violences, dissensions, guerres fratricides, au milieu desquelles, pourtant, le jeune Islam, irrésistible, et comme emporté par son élan, fixe peu à peu les contours spirituels et, d’emblée, les bases de sa puissance temporelle.
  • A propos de la période de la fin du XIXème siècle, page 328 :
    « L’Islam, d’un bout à l’autre de son monde, animera l’histoire de ces révoltes, où l’Occident ne voulût voir longtemps que des péripéties de son aventure coloniale. Si l’on peut découvrir aussi, dans ces mouvements, les nationalismes en train de naître ou de se confirmer, c’est néanmoins l’Islam qui reste encore l’âme de la résistance, le mot d’ordre commun de toutes les énergies, le grand rassembleur des forces de contestation ».
  • Et plus généralement, page 38 :
    Le débat est depuis longtemps ouvert, pour Muhammad comme pour tout homme exceptionnel, des parts respectives de la personne et de l’histoire. La tradition musulmane exalte évidemment la prédestination du Prophète en un portrait d’ailleurs touchant, plus vrai et moins systématiquement idéalisé qu’on ne le croirait : comme Dieu Le lui fait dire par le Coran, il n’est qu’un homme, objet de faiblesses, de doutes ou d’inquiétudes, et ses vertus cardinales en apparaissent d’autant mieux.

L'auteur

  • André Miquel, né le 26 septembre 1929 à Mèze (Hérault) et mort le 27 décembre 2022 à Paris, est un universitaire et historien arabisant français, spécialiste de langue et littérature arabes.
  • Après une khâgne à Montpellier, il entre à l'École normale supérieure de la rue d’Ulm en 1950 et en sort agrégé de grammaire en 1953, puis docteur ès lettres en 1967. En 1953-1954, il est boursier auprès de l'Institut français d'études arabes de Damas.
  • Son intérêt pour le monde arabe remonte à un voyage au Maghreb, gagné après son succès au concours général de géographie, en 1946, ainsi qu’à sa découverte du Coran dans la traduction de Claude-Étienne Savary.
  • Tour à tour, diplomate et enseignant, André Miquel est connu pour ses travaux sur la géographie arabe médiévale, la poésie et la littérature arabe classiques et pour sa traduction des Mille et Une Nuits
  • Il fut Membre du conseil scientifique de l'Institut français d'archéologie orientale, élu au Collège de France où il occupa la chaire de « Langue et littérature arabe classique », puis administrateur général de la Bibliothèque nationale.

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