Les Terres indomptées

Sauvage et libre pour survivre. Un roman dur, beau, superbement écrit
De
Lauren Groff
Editions de L' Olivier
Traduction de l' anglais Carine Chichereau
267 pages
23, 50 euros
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Thème

Une fuite éperdue. La peur au ventre. A travers les bois, les rochers, le fleuve, dans une nature hostile, sauvage. La jeune servante trace vers le nord, vers le havre des colonies françaises. Derrière elle, un fort pourri où la faim et les maladies ont ratiboisé les colons anglais et leurs familles. Une pauvre orpheline qui n'est rien, une chose, elle ne possède même pas de nom, juste quelques sobriquets, c' est "une petite bouffonne qui chantait et dansait" pour amuser sa maîtresse.

Surtout ne pas se retourner. Pour survivre, gratter l' écorce des arbres, ingurgiter un poisson gelé, des araignées ou des larves. Hommes ou bêtes,  le danger rôde, il faut apprendre la langue de la nature, tenter d'apprivoiser ces espaces immenses peuplés par des tribus indiennes (les Powhatans) - des païens, affirment  les jésuites. La jeune fille, elle, croit en Dieu avec la foi simple, immédiate, des cœurs purs. Mais elle est taraudée par la conscience du péché, une mère prostituée, la hantise d'un sacrilège récent et l’impossibilité de nommer les choses. Ses visions la transportent loin, au-dessus de la terre et des dangers de toute sorte. Solitude absolue transpercée parfois par des moments de grâce : la rencontre charnelle avec un jeune souffleur de verre sur un bateau, un soir de tempête.

Le fantôme de cet amour la poursuivra à jamais...

Points forts

  • Un récit âpre, poignant, porté par une langue magnifique. 

  • Une ode à la nature salvatrice où le bon sauvage, cher à Rousseau, est parfois hostile ou indifférent, mais rarement aussi maléfique que le colonisateur. 

  • Une héroïne courageuse et digne qui arrache sa liberté à la gangue des préjugés masculins de son époque. 

Quelques réserves

Cette œuvre s' inscrit dans la tradition américaine du roman de survie. Certaines pages peuvent nous sembler parfois un peu longues ou répétitives. Ainsi les coliques néphrétiques, hépatiques ou intestinales du personnage sont abondamment décrites...

Encore un mot...

 Pour atténuer la remarque précédente, ĺe corps disgracieux ou atypique des personnages de Lauren Groff est souvent mis en exergue dans ses romans. Dans Matrix, elle faisait de Marie de France une géante hideuse. Ici la survie passe par les fonctions indispensables au corps...

Une phrase

 “ Pourtant,  même dans sa vision, elle se prit à rêver d' une autre âme près de laquelle elle eût passé sa vie. Malgré la résistance d' autres esprits, nos pensées se trouvent arrachées à leurs formes confortables, et là commence la véritable réflexion. Elle se prit à rêver d' un autre corps qui veillât aux besoins du sien, et qui acceptât en retour les soins qu'elle lui prodiguerait avec amour. Une main qu' elle put tenir, un visage à aimer. Les êtres humains n' ont jamais été faits pour vivre seuls.” (Page 258)

L'auteur

Née en 1978 à Cooperstown dans l'État de New York, Lauren Groff est l' une des auteures les plus importantes de sa génération. Elle a publié Les Monstres de Templeton (Plon,2008), Arcadia (Editions de l’Olivier, 2012) Matrix ou Les Furies

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