Gabriel’s moon

Une affaire d’espionnage un peu alambiquée
De
William Boyd
Seuil
Traduit de l’anglais par Isabelle Perrin
Publication le 19 Septembre 2025
354 pages
23 €
Notre recommandation
3/5

Infos & réservation

Thème

 Gabriel Dax a vécu des traumatismes qui l’empêcheront longtemps de trouver le sommeil. Orphelin de père, sa maison a été ravagée par le feu, une nuit d’automne, emportant la vie de sa mère au passage. Réfugié chez son oncle, Aldous Dax, un marchand d’art iconoclaste et attachant, il survivra tant bien que mal à ce désastre, aidé financièrement par une compagnie d’assurances généreuse qui paiera ses études ; Sefton, son unique frère survivra aussi, mais grandira quant à lui chez la sœur de sa mère qui l’adoptera et lui donnera son nom. Gabriel Dax et Sefton Roscommon, deux frères aussi dissemblables que possible, jusque dans leurs patronymes ! 

 Gabriel, encouragé par son oncle et tuteur, va se consacrer à l’écriture et connaître quelques succès littéraires qui lui vaudront la bienveillance de son éditeur et un passeport pour toutes les destinations possibles, accessoirement une couverture formidable pour les services secrets. Sefton, son frère, sensé quant à lui travailler pour le Foreign Office  va lui confier quelques missions anodines, rémunératrices et dépourvues de danger réel. Jusqu’au jour où Faith Green entrera en scène et le manipulera à la perfection pour faire de lui et malgré lui « son espion ».  Elle travaille pour le fameux M16, entendez l’Intelligence Service  et lui confie des missions à son tour, dans la foulée de son interview remarquée de Patrice Lumumba, le premier Président de la République Démocratique du Congo devenu libre, aussi vite assassiné qu’élu. Il deviendra ainsi le jouet de cette espionne machiavélique qui l’utilisera pour diverses causes, sans rapport les unes avec les autres, le mettra en présence d’espions, d’agents doubles travaillant à la fois pour l’Occident et pour les Russes à l’époque de la Guerre froide, ou de « termites », les agents dormants ainsi nommés qui sapent une institution de l’intérieur. 

Points forts

Les personnages principaux, intéressants, ainsi Kaith Green bien sûr, la brune fatale et manipulatrice, Aldous Dax, l’oncle débonnaire perdu dans le monde abstrait des estampes qu’il achète et qu’il vend, Caldwell, l’agent double « retourné », Lorraine, la serveuse de bar qui aime Gabriel sans rien savoir de ce qui le tourmente, Gabriel Dax lui-même qui va se prendre longtemps pour « l’idiot utile » pour finalement, sinon comprendre tous les enjeux, du moins analyser assez vite les risques du métier et les conjurer.

Quelques réserves

  •  La confusion des situations, l’imbroglio des missions et des affaires et la difficulté de compréhension et de lecture de l’ensemble qui en résulte.

  • Le style, souvent artificiellement littéraire, lesté de mots pompeux qui n’ajoutent rien au récit, ainsi l’adjectif « postprandial » mis à toutes les sauces, les vraies fautes de français qui font entrer le héros « à Cadix » plutôt que « dans Cadix », les expressions curieuses du type du « vin viné » ou de « la migraine post-xérès 

Encore un mot...

Les Anglais sont légion dans cet exercice, à mi-chemin entre le roman d’espionnage et le polar,  Len Deighton, Mick Herron, Charles Cumming, John Le Carré bien sûr, comme ils sont experts dans l’art de l’espionnage.    

On lit agréablement ces histoires imbriquées, sans lien apparent, sinon celui de leur chef d’orchestre, ce démarchage de l’idiot utile au service d’une cause qui suppose du tact et beaucoup d’intelligence, de l’opportunisme aussi, cette initiation d’un dilettante au métier de l’espionnage qui va faire d’un vrai naïf un faux naïf. Le rythme est soutenu, les rebondissements disputent l’intérêt aux fausses pistes pour tenir le lecteur en haleine. Mais on reste quand même un peu en retrait du récit et des interférences alambiquées qui le jalonnent.

Encore, doit-on dire que Boyd a fait mieux en termes de style ! Question de traduction peut-être (Isabelle Perrin, traductrice). 

Une phrase

 « Empruntant les chemins détournés pour retourner à Madrid, il prit tout son temps, comme il se l’était promis, quittant la N-IV quand l’envie l’en prenait pour aller explorer l’arrière-pays et découvrir d’obscurs villages tout en longueur qui semblaient bloqués au XIX siècle. Il remarqua qu’y rôdaient toujours un ou deux policiers sous différents uniformes et que trônait dans tous les bars, restaurants, banques ou hôtels, le portrait du Caudillo, le général Franco, témoignant de l’étrange égotisme des autocrates qui exigent que leur image, tel un leitmotiv pictural, s’affiche absolument partout ». 

L'auteur

William Boyd est né en 1952 ; il a passé son enfance en Afrique, au Ghana puis au Nigeria, ses parents étant issus de la colonie britannique, son père en particulier, médecin spécialiste des maladies tropicales dont il mourra ! 

Il suit ses humanités en Afrique, intègre ensuite l’Université de Nice puis celle de Glasgow et finalement Oxford où il enseignera la littérature au St Hilda's College, avant de devenir journaliste et romancier. Son premier roman publié en 1981,  A Good Man in Africa, est distingué la même année du prix Whitbread du premier roman et du prix Somerset-Maugham en 1982. Auteur de nouvelles et d’une quinzaine de romans, il a déjà écrit sur l’Afrique et sur l’espionnage, deux thèmes qu’il aborde ici. Francophile et francophone, propriétaire d’un domaine viticole du côté de Monbazillac, il aime la France et sa langue mais il écrit en anglais, sa langue maternelle, ce qui lui vaut ces traductions de qualité aléatoire.

 

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